Sacrée maladie ou maladie sacrée?
Parfois, la maladie prend le dessus. Le dragon ailé me provoque, me défie. Ce sont les moments où, terrassée par la douleur, l'épuisement et la peur, je suis couchée sur mon lit et mes démons intérieurs font écho au dragon: 'saleté de maladie, pourquoi t'en prends-tu ainsi à moi? Comment vais-je m'en sortir? Et si je dois repartir à l'hôpital? Je ne supporterai pas une nouvelle opération, qu'on trifouille dans mes entrailles. Et s'ils doivent tout m'enlever? Bye bye l'enfant à tout jamais dans cette vie.'
Le sacré, le sens, la puissance, tout cela est balayé d'un coup de queue du dragon.
Me voilà en train de m'observer: je me sens victime, impuissante, prise entre les griffes d'un mal incurable, indomptable. Qu'est-ce que je te hais, sacrée endo, dans ces moments-là…
Où est partie la déesse, la sage, la prêtresse en devenir que je pressens émerger en moi? Elle cède la place à la petite fille que j'ai été -l'impuissante, celle qui devait se soumettre à la volonté de ses parents, qui croyait qu'il n'était pas autorisé, pour se faire aimer, d'être elle-même.
Je conjure Marie-Madeleine et mes guides de me soutenir, de m'aider à sortir de cette infecte solitude, de cette lave de douleurs. Mais rien ne se passe.
Alors j'écris. J'écris ma haine, ma colère. J'écris à l'Endométriose. Je la vois en face de moi. Je lui parle. C'est ainsi que peu à peu, les larmes arrêtent de couler; mon fiel se déverse, mon dégoût de cet état d'impuissance se révèle.
Autrefois, les douleurs physiques dans tout le corps, les nausées et l'épuisement intense, sans compter la peur de me faire opérer à nouveau, de perdre mes ovaires, étaient tels que je me laissais dériver vers les profondeurs abyssales du désespoir. Aujourd'hui, la souffrance est toujours là, mais j'ai appris à puiser, dans ma force intérieure, le courage et la confiance pour faire face à la vague. Au lieu de me laisser submerger par la maladie, j'ai développé des outils de développement personnel et approfondi mon cheminement spirituel à tel point que je sais, même si c'est difficile, pouvoir compter sur mes ressources intérieures.
Ainsi, je me remets debout. Je sens la puissance revenir, petit à petit, dans mon cœur, mon corps et mon âme.
Au cœur de la tempête, il m'est difficile de méditer. Mais lorsque les eaux sont calmes, je m'y adonne avec beaucoup d'élan. En cultivant la paix, je me reconstruis de l'intérieur, je visualise une Emmanuelle en pleine santé. Chacune de mes cellules se met alors à danser de joie, vibrante de lumière.
La gratitude est un outil puissant également. A nouveau, il m'est difficile de dire merci quand le désespoir et la douleur prennent le dessus. Mais dans le souffle entre deux, dans les temps qui précèdent, dans les moments où le volcan se calme, j'ai intégré à mon programme la pratique de la gratitude. C'est ainsi que la gratitude m'a permis de toucher à un moment de grâce dans un moment de souffrance extrême. Quelques heures après une lourde opération, alors que dehors, la tempête faisait rage et que dans ma chambre d'hôpital, vaseuse, nauséeuse et rattachée à une perfusion d'antibiotiques qui me brûlaient les veines, je n'avais d'autre distraction que respirer, juste respirer, et regarder dehors…. Je me suis dit, à cet instant même, que finalement, j'avais une chance énorme: les soucis qui composent généralement notre quotidien m'étaient épargnés: que vais-je faire ce soir? Où vais-je passer mes prochaines vacances? Quelle tâche va encore me confier mon chef? Est-ce que je vais rencontrer le grand Amour?
Mon seul souci possible, à ce moment-là, était de respirer et d' "attendre que ça passe". J'ai senti un énorme lâcher-prise, une détente exquise m'envahir. Et c'est à ce moment-là qu'en tournant la tête vers la fenêtre (c'était la seule partie du corps que j'étais en mesure de bouger), j'ai vu un magnifique rayon de soleil percer à travers les nuages. Un rayon au milieu de la pluie. MON moment de félicité dans la journée. Je me suis sentie sourire, m'émerveiller. Ce fut ma minute de grâce. Peut-être ai-je même toucher à l'éveil, à ce moment-là. Lorsqu'aucune attente ne pollue le moment présent, lorsqu'on s'abandonne à ce qui est…un grand OUI émerge de l'intérieur. Gratitude pour ce moment béni, au milieu du champ de bataille de ma vie.
L'accompagnement thérapeutique, en particulier par des femmes et des hommes sensibles aux troubles du féminin, m'a également permis d'évoluer grandement.
Il y a les thérapies pour soigner le corps. Mais l'âme n'est pas à négliger. Faire des régimes sans gluten ni lactose, éliminer les aliments anti-inflammatoires et prendre quelques remèdes alternatifs sont certes des éléments-clés vers le mieux-être, dans le cas d'une endométriose.
Mais comprendre ce qui se cache derrière la maladie. Y mettre du sens. Guérir l'âme, affronter la colère et dépasser les peurs. Tout cela est à mon sens essentiel, sans quoi la guérison se fera en surface.
Oser se poser les questions suivantes, en toute humilité, demande du courage: y a-t-il une partie de moi qui a peur ou n'a pas envie d'avoir un enfant? Suis-je en train de mener la vie qui me convient? Qu'est-ce que mon ventre a envie de créer? Suis-je à l'écoute de ma yoni (en sanskrit, ce mot signifie temple sacré et décrit le sexe de la femme)? Suis-je dans le respect de mon corps? Quelle est ma vision de moi en tant que femme? Suis-je en paix avec les hommes? Avec mon propre masculin? Et que dire de ma sexualité?
Cela revient à se demander: qu'est-ce que la maladie a à me dire? Pourquoi touche-t-elle mon corps de femme? Que cela soit l'endométriose, un cancer du sein ou de l'utérus, un fibrome ou des mycoses, la question mérite que l'on s'y arrête.
Et si la Vie trouvait un moyen certes confrontant, mais riche en potentiels -le corps -pour me révéler qu'il est temps de m'arrêter, de me regarder? Et d'affronter, pour aller vers le meilleur de moi-même?
C'est alors que le chemin vers le sacré commence. Le cheminement spirituel prend alors le dessus sur la guérison purement physique.
Quel intérêt à poursuivre sur cette voie?
Quoiqu'il arrive, qu'une guérison physique survienne ou pas, la joie va émerger. Qu'y a-t-il en effet comme plus grande source de bonheur que de comprendre qui l'on est et de faire rayonner son essence, de toucher à sa partie divine, celle qui est plus vaste que ce que l'on croit savoir de soi? Lorsque le sens émerge, la vie, dans toute sa splendeur, s'illumine.
C'est alors que la sacrée maladie devient une maladie sacrée.
"Plus un être découvre sa dimension spirituelle, plus sa sensibilité s’accroît et s’affine. Sa vulnérabilité atteste de la délicatesse de son âme."
Jacqueline Kerlen
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